ÉDITORIAL
       
 
   
   
Édito N° 2 - décembre 2008  
    

 

 

IL VA FALLOIR CHOISIR

 

Il va falloir choisir

Entre spectateur et citoyen
Entre consommateur et décideur
Entre mondialisation et mondialité
Entre Charybde et Scylla
Entre le Président Chinois et le Dalaï Lama
Entre démocratisation et démocratie
Entre poire et fromage
Entre économique et économie
Entre intermittence et permanence
Entre spectacle de rue et spectacle dans la rue
Entresort et entrebaille
Entre la vie et la survie
Entre hobby et lobby
Entre le bœuf et l’âne gris
Entre la gauche de droite et la droite de gauche
Entre passivité et résistance
Entre Eros et Thanatos
Entre l’écorce et l’arbre
Entre chien et loup
Entre d’où on vient et où on va.

Il faut choisir.



SPECTATEUR OU CITOYEN

Le théâtre grec est à l’origine de notre théâtre. Oui, mais quel théâtre Grec ? : celui de la poétique d’Aristote, ou celui des grandes Dionysies ? N’avons-nous pas gardé uniquement la forme littéraire et codifiée de la tragédie grecque, au détriment du rituel qui rassemblait et unifiait la cité ? C’est la thèse de Florence Dupont, dans « Aristote ou le vampire du théâtre occidental » (Ed. Aubier), thèse décapante et formidablement éclairante sur une possible évolution de notre théâtre, tellement compassé, figé dans sa forme, où, dit-elle, l’ennui poli apparaît trop souvent.

Au travers du théâtre, c’est toute la question de la société et de la démocratie qui se pose. C’est le statut du citoyen : est-il considéré comme tel, comme un être responsable et agissant, ou comme un simple spectateur qui assiste au mieux, subit plutôt, la tragédie ou la farce politiques qui se déroule devant les yeux. Le citoyen est muet, infantilisé, et l’on voudrait lui faire croire qu’un bulletin de vote tous les cinq ans va lui permettre d’infléchir une politique qui lui échappe totalement.

Il en va de la politique comme de la culture : une véritable démocratie transformera des spectateurs en citoyens, et le spectacle en rituel profane, en fête, en célébration collective. Cela passe par une volonté réelle d’organiser les lieux et les temps de la réflexion, de l’échange et de l’éducation, de la culture civique et du débat politique.

Il est nécessaire de démocratiser la démocratie, la politique et la culture. Voilà l’Utopie, délicate à réaliser, entre le diktat des professionnels de la politique et de la culture, et la dérive possible vers le populisme.

C’est par une forte participation du citoyen que cette utopie pourra se réaliser, en ouvrant des chantiers de réflexion et d’action dans les deux domaines, de la politique et de la culture.

Pendant longtemps on a raisonné, pour le secteur politique, en terme de « service public ».
Après l’ère Jeanne Laurent et André Malraux, nous devons aborder une ère de démocratie culturelle où le citoyen ne sera plus un assisté, tributaire du « service public », mais un « actant » de la vie culturelle.

Pour réaliser cette évolution et ce projet ambitieux, le théâtre de rue peut jouer un rôle d’éclaireur, d’ouvreur de piste. Nous y oeuvrons avec la création du Festival de Colportage d’Epinal il y a 25 ans, l’apparition des Padox en 92, et je vais modestement essayer de contribuer à son développement au sein du Conseil d’administration de la SACD. Les arts de la rue se situent dans l’interaction, la confrontation avec le public le plus large, avec inventivité et générosité. Il ne doit pas se limiter aux seuls festivals, tellement nécessaires pour faire émerger les spectacles et les Compagnies, mais parfois transformés en faire-valoir de municipalités en quête de reconnaissance populaire. Il a besoin de se développer dans des actions de terrain, dans un frottement permanent avec le spectateur qui n’est plus considéré comme un consommateur, mais comme un citoyen responsable et partenaire.

Amicalement
Dominique Houdart

 
   
     

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